Chroniques à 4 mains # 3
Cette idée de chroniques à 4 mains, nous est venue, ma petite fille Océanne qui a 17 ans et moi, après une semaine de confinement suite à l’annonce du Coronavirus. Ainsi, le jour de mon anniversaire, Océanne m’a fait parvenir un mot, qui démontrait la force immense de la transmission lorsqu’elle est enveloppée d’amour et de tendresse. Ce mot m’est allé droit au cœur et m’a rappelé comment Océanne avait le don de l’écriture. Comme c’est un héritage familial que nous partageons, je lui ai proposé une chronique quotidienne, où chacune de notre côté prendrait le temps d’écrire autour des moments marquants, touchants, en ce temps de retrait et de temps pour soi que nous permet cette pandémie. Elle a accepté d’emblée et le soir même m’a envoyé son premier texte.
C’est ainsi, que nous chroniquerons au quotidien sur la vie qui bat au temps du Corona. Cet amour de l’écriture qui nous lie et nous relie depuis toujours, trouvera ainsi un écho jusqu’à vous. Comme grand-mère, je suis honorée d’amorcer cette démarche de transmission à 4 mains et 2 cœurs. Lorsqu’Océanne écrira, ce sera sous les lettres OB, pour Océanne Barolet et MR pour moi, pour Manon Rousseau.
27 mars 2020
MR : Ma chérie, j’ai lu aujourd’hui un article de Jean Kabuta, un artiste et un enseignant de Rimouski, qui transmet le kasàlà, un art oratoire d’inspiration africaine, qui selon ses dires est l’art de rendre grâce, de s’émerveiller et de célébrer. Pour cet homme, le processus créatif « c’est d’expérimenter le mystère et démontrer que les humains sont une émanation du potier primordial ». J’aime bien tous les noms que l’on donne à Dieu, mais le potier primordial, celui d’où toute création part, j’adore, d’autant que cela suggère que nous soyons aussi des potiers puisqu’il est le premier, mais définitivement pas le seul.
Pour terminer, il dit aussi que créer sert aussi à contribuer à donner un sens à la vie et au monde. Je n’ai pas la prétention de connaître le sens de ce virulent virus, mais la joie que j’ai vue aujourd’hui dans les rues, du voisin qui met de la musique, aux sourires et bonjours contagieux des marcheurs, me murmure quelque chose. Le bonheur que j’entends à l’unisson du fait de ralentir et de donner du temps au temps et à ceux que nous aimons, me laisse croire que tout ceci a un sens qui nous dépasse, tout en nous rappelant l’essentiel. La jardinière en moi, celle qui aime les choses simples, les relations vraies qui apporte toujours plus d’amour, la part de mystère en ce monde, trouve infiniment de contentement à ce moment suspendu dans le temps. Bien sûr, tout n’est pas gai et des personnes souffrent, d’autres travaillent très fort, mais cela n’affecte pas le sentiment généralisé de solidarité qui émane après ces 2 semaines de confinement. Ainsi, je souhaite réellement, que lorsque les choses se remettront à rouler, que nous retenions quelque chose de tout cela, que nous conservions un rythme différent, une attitude bienveillante envers ceux qui nous entoure et la terre qui nous porte. Je ne sais pas si la frénésie de l’économie reprendra ses droits, mais j’espère sincèrement que nous serons plus nombreux à lui mettre un frein. Je t’aime!
OB : Pour ma part, aujourd’hui, j’ai pris le temps de relaxer et de réfléchir, en ruminant plusieurs questions, malgré le tourbillon d’événement qui se passe présentement avec ce virus. En est ressorti de nombreux points positifs. Je crois que nous avons tous besoin, les uns comme les autres et pour diverses raisons, de ce confinement. Se relaxer, passer du temps en famille (il n’en manque pas), penser à soi, sans avoir le poids constant de l’école et du travail…. Pour ma part, cela me fait le plus grand bien. Ce congé était en quelque sorte ce qu’il me fallait pour me reprendre sur différentes choses et me recentrer sur ma personne. J’ai enfin pu prendre le temps qu’il fallait pour retisser les liens avec ma famille et me reconstruire en tant que jeune femme! Je pense sincèrement que je ne suis pas la seule! Donc, seule face à moi-même, je remercie la vie de me permettre de prendre du temps pour moi et pour me recueillir.
Manon Rousseau et Océanne Barolet