J’ai commencé l’année en disant oui, un grand oui, en sautant dans le oui à pied joint, https://www.manonrousseau.com/2018/01/juste-oui/. Ignorant que ce ouiiii me porterait, m’engagerait dans tout ce qui touche de près ou de loin, l’humilité, l’abandon et la confiance. Ainsi, pendant que certain marche Compostelle, moi je trotte sur le sentier étroit et sillonneux de ces trois vertus, difficile à acquérir, du moins pour l’humble personne que je ne suis pas encore. Ainsi, de jour comme de nuit, beau temps, mauvais temps, je les médite, les mâche, les trébuche, les prie, les déguste, les erre, les vagabonde et les voyage. D’ailleurs, depuis que j’ai entrepris ce pèlerinage, je n’ai pas beaucoup écrit, il semble que lorsque je suis à intégrer de nouveaux enseignements, je ne puis écrire. Trop occupée à vivre, ensemencée de tout et de rien, j’intègre, je ramène les morceaux qui semblaient dispersés, mais qui attendaient simplement que je leur offre mon attention pour se dévoiler et se mettre en place.
Pas facile l’humilité, l’abandon et la confiance, cela suppose que l’on se sente suffisamment en sécurité, porter, supporter, aimer, pour laisser aller et sauter dans le vide, le cœur grand ouvert en accueillant ce qui est sur le chemin. Cela demande aussi d’accepter de ne pas tout diriger, contrôler, vouloir, savoir et abdiquer au fait que par nous-même nous sommes tout puissant. Paradoxalement, c’est aussi très doux de marcher sur ces chemins. C’est ne plus se battre, avoir foi que la vie est de notre côté, accueillir ce qui est et être pleine de gratitude pour ce qui se présente, sans jugement moral de ce qui est bon ou mauvais. C’est aussi tout offrir au mystère de vivre, car seul ce qui est accueilli peut ensuite être offert…
Marcheur, tu fais ton chemin en marchant, parfois il se fait en demeurant presque immobile. Cela m’est arrivé 2 ou 3 fois cette année en raison de vertèbres qui n’en font parfois qu’à leur guise. Ainsi, m’abandonner, c’est accepter de ne presque plus marcher durant près d’un mois cet été et durant quelques jours en voyage. C’est avoir l’air d’une petite vieille de 90 ans qui prend la main secourable de sa petite fille ou de son compagnon, pour avancer avec lenteur et attention et y trouver plus que de la joie. Toute ma vie, je me souviendrai avec émotion de la bienveillance, de la force et de l’amour qu’il y avait dans la main secourable de ma petite, mais non moins grande Romy de 8 ans.
C’est aussi accueillir la peur immense qui revient quand sa petite fille adolescente expérimente, prend des risques et cherche l’intensité. Cette peur qui me réveille et me ramène à 4 heures du matin vers l’adolescente que j’étais et vers tous ceux et celles que j’ai aimés et qui se sont fait si mal en raison de leur soif d’intensité. C’est se rappeler et refaire confiance encore et encore, en cette force de vie qui nous habite et se développe au contact de la vie elle-même, avec tout ce qu’elle contient de beauté, d’écueils et de périls. Par-dessus tout, c’est éprouver dans sa chair, combien il est ardu de se détacher, de faire confiance et de conserver une distance affective et émotionnelle lorsque cela touche nos proches et nos bien-aimés. C’est prier, invoquer et entretenir, dans le visible comme dans l’invisible, les liens d’amour tissés de cœur à cœur au fil du temps.
Depuis que j’ai commencé cette chronique, il m’est arrivé en quelques jours plus d’écueils que dans la dernière année. C’est assez cocasse de s’apercevoir que lorsque l’on porte en soi une intention sincère, tout concourt pour développer les habiletés nécessaires afin de vivre et mettre en pratique ce qui, au départ, n’était que théorie et espoir. Ainsi, depuis quelques semaines, je fais face à de petits et grands bouleversements. Des situations qui me mettent et me ramènent dans un état d’impuissance, me rappelant sans cesse que je ne suis pas toute puissante et que je n’ai pas le contrôle. Des situations qui me posent continuellement le même défi, celui de demeurer et conserver ce sentiment de confiance, qui m’apporte la paix et la certitude que tout est OK, et ce, sans que je n’intervienne constamment.
Sacré test ou test sacré, je ne puis le dire, mais encore une fois, force est de constater que tout au long de l’aventure qui est nôtre, nous disposons sans cesse des expériences nécessaires pour bien apprendre nos leçons. Je ne sais pas, ou plutôt je suis certaine que je n’ai pas la note de passage dans les situations de crise, pour ce qui est de la confiance, la capacité à m’abandonner et à croire suffisamment que tout est correct, pour me détendre et relaxer. Cependant je sais dans chacune de mes cellules que tout participe pour que cela s’inscrive et persiste dans le temps. Et comme le disait si justement Christiane Singer, j’ai foi que « Rien ne nous est donné pour nous écraser ».
Voilà, il semble que ce soit complet, pour cette fois du moins. C’est drôle comme je fais de plus en plus rapidement le tour du sujet lorsque j’écris, alors que cela prend des mois d’expérimentation pour quelques paragraphes bien sentis. Il y a tant à vivre pour pouvoir écrire et par les temps qui courent et m’immobilisent, j’écris de tant de manières. Au fond, je ne cesse d’écrire, de tisser des ponts entre vous et moi. J’écris continûment, avec des fleurs, des bouquets, des mots, des chants, un jardin, des prières, des photos, etcétéra, téra.
Manon Rousseau / octobre 2018