Un soir d’automne et de grande fatigue, après une semaine de travail assez olé olé, je demande à mon compagnon de venir me chercher au travail pour me ramener à la maison. Trop fatiguée pour conduire ou pour quoi que ce soit d’autre, l’énergie à zéro, je descends mon banc de voiture et m’allonge, laissant mon esprit flotter dans le vent. Je laisse défiler les nuages et le paysage que je vois à travers la vitre de la voiture. Nous sommes en silence, le soir tombe et nous passons devant un champ brumeux.
Tout à coup, l’espace d’un moment, devant ce champ de brume, je me sens, je ressens plutôt comme si
j’étais morte, faisant partie de tout, du champ, de la brume, de l’air du soir, de tout…
Moment de grâce.
Je me dis : «Comme c’est doux d’être morte, d’être dans ce grand tout, dans cette espace»… Et aussitôt, hop, terminée, je suis de nouveau dans la voiture. La fatigue est toujours là mais accompagnée d’une grande paix. C’est doux, très doux. La peur de mourir qui me taraude toujours un peu est disparue, je me dis même que j’ai plutôt hâte de retrouver cet état de grâce. C’est tout, c’est beaucoup et c’est là quelque part déposé en moi.
Vivement mourir un peu!
MR/2005